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Sefer ha-Gilgulim (Traité des révolutions des âmes)
(Francfort-sur-le-Main : David ben Nathan Gruenhut, 1684)

À propos du livre

S’inspirant des enseignements kabbalistiques, ce « Livre des transmigrations » traite de la transmigration des âmes. Selon cet ouvrage qui se penche sur les péchés de nature sexuelle, la longue liste des châtiments infligés aux transgresseurs précise qu’ils seront ressuscités sous la forme d’animaux ou d’êtres humains peu engageants. Par exemple, celui qui a eu des relations sexuelles avec une non-juive serait réincarné en prostituée juive.

Gilgulim évoque également l’importante pratique kabbalistique des exorcismes pratiqués à Safed, où le « père » de la kabbale contemporaine Isaac Louria, Vital, et le fils de Vital, Samuel, étaient reconnus comme de puissants exorcistes. Ils considéraient les maladies physiques ou mentales soudaines comme des manifestations du besoin d’une âme pécheresse d’habiter le corps d’un animal, afin d’aller au bout de sa punition. Si elle ne peut y exister, une telle âme cherche alors un hôte humain, en particulier chez les femmes, perçues comme étant plus vulnérables que les hommes. Gilgulim décrit, étape par étape, l’exorcisme d’une femme chaste habitée par l’esprit d’un pécheur tripolitain. Il reproduit également un interrogatoire de cet esprit pour comprendre comment il en est venu à habiter le corps de la femme.

Bien que Vital soit notre seule source concernant les concepts de Louria, dans Gilgulim, Vital lui attribue l’origine de nombreuses idées que Vital a élaborées. Par exemple, Louria interprète la transmigration comme étant à l’avantage du peuple juif, car les « bonnes » âmes peuvent revenir et travailler avec leurs âmes réincarnées actuelles dans le but de réparer des torts antérieurs. Vital postule ensuite que la division d’une seule âme en nefesh (âme), ruah (esprit) et neshamah (souffle de vie) la rend capable de connaître plusieurs destins. Il atténue l’accent mis sur le péché et les angoisses qui l’entourent en soutenant que la réincarnation peut préparer l’âme à l’ascension, et qu’il est possible de réparer le péché si l’on peut établir la généalogie de l’âme avec certitude et rechercher les péchés antérieurs qui nécessitent une expiation. Vital suggère que si chaque personne entreprend ce processus, l’univers entier peut devenir parfait.

À propos de l’auteur

Haïm ben Joseph Vital (1542-1620) est né à Safed, un centre de la kabbale et du mysticisme juif. Bien qu’il ait été un jeune étudiant de la Torah prometteur et marié, ses études et son mariage l’ont laissé insatisfait. Vital a rapidement abandonné sa femme, et Élie lui serait apparu en rêve, le persuadant que sa destinée était comme kabbaliste. Vital a alors passé deux ans à étudier l’alchimie et il a eu une autre vision d’Élie lui confirmant qu’il écrirait un commentaire sur le Zohar (Livre de la splendeur). 

Vital était alors étudiant et membre du cercle restreint du rabbin et principal kabbaliste de Safed, Moïse ben Jacob Cordovero. Cependant, après l’arrivée d’Isaac Louria en 1570 et la mort de Cordovero peu de temps après, Vital et ses condisciples se sont tournés vers Louria. Connaissant depuis longtemps le travail de ce dernier, Vital devint son principal disciple. Lorsque Louria est mort en 1572, Vital lui a succédé en tant que chef des kabbalistes de Safed. Il a ensuite commencé à rédiger les enseignements de Louria; c’est ainsi que Vital est devenu une pierre de touche essentielle pour les historiens qui cherchent à comprendre la vie, le travail et les étudiants de Louria. 

Vital a finalement quitté Safed, passant du temps en Égypte, à Ain Zeitoun et à Jérusalem avant de s’installer à Damas. Là, il a dirigé la communauté juive de Sicile et il a rédigé le commentaire de la Bible Sefer Eẓ ha-Da’at, sa première œuvre originale, dont il ne reste que des parties. Il est ensuite retourné à Jérusalem, où, en 1590, son maître, le rabbin Moïse Alshekh, l’ordonna symboliquement comme rabbin. Il s’est ensuite rendu à Safed, où il est tombé malade et est resté alité pendant plus d’un an. En 1594, Vital est retourné pour de bon à Damas où il a donné des conférences quotidiennes sur la kabbale et produit des textes kabbalistiques jusqu’à sa mort. 

Les exemplaires de la BPJ

L’édition de 1684 de la BPJ mesure 19,5 x 15,5 x 1,5 cm. Comme bon nombre de textes kabbalistiques de notre collection, ses 82 feuillets en font un volume relativement mince. De toute évidence, il s’agit d’une nouvelle reliure, dont les ais supérieur et inférieur ont été recouverts d’un papier noir presque entièrement détaché du plat recto. Le dos, étiqueté seulement d’un petit papier collé portant le titre du livre encré en caractères minuscules, indique les modestes moyens de la personne assumant les frais de la reliure. Les gardes au début et à la fin de l’ouvrage ont été remplacées par un papier beaucoup plus récent et plus épais. Tout ce qui reste du livre original est le texte proprement dit; même la page titre est absente. Une brève note manuscrite, pratiquement illisible, en caractères bruns délavés, dans le coin supérieur gauche de la première page, est la seule indication d’un propriétaire précédent.

À propos de l’imprimeur

Le talmudiste et kabbaliste allemand David ben Nathan Gruenhut a imprimé Gilgulim pour la première fois en 1682. Cependant, le rabbinat de Francfort en a bloqué la distribution initiale, considérant que tous les ouvrages kabbalistiques faisaient partie intégrante de la menace que représentait pour lui le sabbatisâmes. Gruenhut réussit néanmoins à en organiser la réimpression en 1684 (dont la BPJ détient un exemplaire) sous l’égide d’un imprimeur chrétien. Il quitta ensuite Francfort, exerçant la fonction de rabbin dans plusieurs villes voisines, avant de revenir en tant que chercheur au bet midrash (centre d’étude juif public) fondé par le grand rabbin de Prague, David Oppenheim. Gruenhut a imprimé d’autres livres remarquables, dont deux auxquels il a ajouté ses propres commentaires : Tov Ro’i (1702) du rabbin et talmudiste allemand du XVsiècle Jacob Weil sur les lois de l’abattage rituel, et Sefēr ḥasidim (1712) de Juda de Ratisbonne, un texte précurseur du mouvement mystique des Hasidei Ashkenaz (les piétistes juifs allemands) du XIIIsiècle.

Fait remarquable, Gruenhut entretenait également des relations cordiales avec les hébraïsants chrétiens allemands Johann Andreas Eisenmenger et Johann Jakob Schudt ‒ du moins, avant qu’ils ne publient leurs ouvrages antisémites. Pour l’édition de la Bible d’Eisenmenger, Gruenhut a rédigé une préface élogieuse, tandis que Schudt a écrit la préface de l’édition de Gruenhut du commentaire de David Kimhi sur les Psaumes. Gruenhut a aussi imprimé une traduction en haut-allemand de la pièce traditionnelle de la fête de Pourim que célébraient les Juifs de Prague et de Francfort (1716). 

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